J’ai récemment terminé de lire The God Delusion de Richard Dawkins, un livre absolument fascinant sur tous les points de vue. Le professeur Dawkins y fait une argumentation complète et soutenue (logiquement et empiriquement) contre la religion en général, et, en quelque sorte, crée un ouvrage de référence solide pour les «athées militants» (comme il l’avait laissé sous-entendre dans sa présentation hilarante à TED en 2002). Je recommande hautement ce livre, que vous soyiez religieux, athée ou agnostique. Il faut le lire du début à la fin (heureusement, M. Dawkins nous rend la lecture très agréable).
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8 responses to “Pour en finir avec Dieu”
Je pense pas que l’agnosticisme soit “entre les deux”, en tout cas c’est pas comme ça que je le conçois.
Le théiste ou l’athéiste défend une position claire par rapport à une question du type “Est-ce que Dieu existe”. L’un répond oui, l’autre répond non. Une autre position pourrait être : “Je ne sais pas”, mais dans cette réponse ne colle pas avec la position des agnostiques. C’est plutôt la position de quelqu’un qui n’a jamais réfléchi à la question.
En tant qu’agnostique, je répondrais: “On ne peut pas savoir”. C’est beaucoup plus fort et ça dépasse les positions théiste et athéiste. Pour justifier cette position, une possibilité pour la justifier serait de reprendre La critique de la raison pure de Kant qui démontre que la métaphysique comme science est impossible. Or “Dieu” est un objet métaphysique. Donc on ne peut rien savoir de Dieu et on ne peut pas savoir s’il existe ou non.
Alors non, c’est pas “entre les deux”, ce serait plutôt au-dessus !
En fait, j’ai effectivement écrit «entre les deux», mais c’était pour vulgariser; tout le monde ne connait pas forcément le terme. Enfin, puisque ça cause confusion, je vais retirer «entre les deux». Je connais tout à fait la position agnostique du «on ne peut pas savoir, et prétendre savoir qu’il n’existe pas est arrogant», et je suis en désaccord avec cette dernière.
L’athéisme a divers degrés, et c’est typiquement la “quasi certitude” (0.000000…1%) plutôt que la certitude absolue (0%) qui définit l’athéisme. C’est pourquoi j’ai dit que l’agnostique est «entre les deux»: pour faire une image mathématique, le croyant croit à 100% en l’existence d’un dieu personnel, l’agnostique dit «on ne peut pas savoir, donc probablement 50% jusqu’à ce qu’on ait une preuve» et l’athée reconnait qu’on ne peut pas savoir, mais dit que la possibilité n’équivaut pas à la probabilité, et que la probabilité tend vers 0%.
En ce sens, je suis en désaccord sur le point que l’agnostique serait supérieur à l’athée. Bien que l’athée puisse superficiellement paraître comme irréfléchi du point de vue agnostique, c’est une interprétation superficielle de l’athéisme. Il y a un degré de réflexion plus poussé et osé. L’agnostique «permanent» se réduit à l’état «d’indécision paresseuse» (je ne veux pas insulter quiconque ici, c’est juste dans le but de tenter d’illustrer mon argument).
Pourquoi de la paresse intellectuelle? Parce que l’agnostique considère qu’on ne peut pas savoir, que cette question est hors du domaine de notre intellect et de la raison, que la question de l’existence de Dieu restera à jamais dans un univers parallèle innaccessible.
Le problème est que la réponse, en soi, existe forcément. Soit dieu existe, soit il n’existe pas. C’est une hypothèse scientifique à tester comme toute autre et il est irresponsable d’abandonner la quête de cette réponse. En attendant une réponse définitive à cette question, nous pouvons toutefois, en tant qu’athée, dire quelque chose d’assez convaincant par rapport à la «probabilité» de son existence.
Pour démolir un peu plus le «on ne trouvera jamais», l’histoire humaine est remplie d’exemple de connaissances qui étaient considérées sacrées ou hors du domaine de la science ou de la raison. En 1835, Auguste Comte disait que nous ne pourrions jamais étudier, par quelque méthode que ce soit, la composition chimique et minéralogique des étoiles. Ahem.
Pour donner un autre exemple, je suis athée envers le Flying Spaghetti Monster au même titre que je suis athée envers Dieu. Je ne peux pas prouver, avec l’étendue des connaissances actuelles, la non-existence certaine du FSM, mais je peux très certainement vous assurer que la probabilité de son existence est quasi nulle. Voilà la position athée raisonnable. Personne n’oserait dire que l’hypothèse “FSM existe” est à probabilité égale avec l’hypothèse “FSM n’existe pas” (excepté pour des raisons humoristiques).
Mais bon, si je continue, je vais me trouver à résumer un sous-chapitre entier du livre. Je le répète, ce livre est fascinant et je le recommande chaudement à tout le monde.
J’ai pas lu le bouquin, mais je trouve pas que ta réponse soit satisfaisante.
Je suis sûr que l’auteur a beaucoup d’arguments pour avancer ses probabilités. Mais elles sont relatives aux prémisses qu’il a choisies. Comme par exemple la définition de Dieu qu’il a prise. Faut déjà se mettre d’accord sur ce qu’on entend par Dieu, si on regarde certaines preuves de l’existence de Dieu, on se rend compte que ce qui est prouvé c’est plus l’existence du monde que l’existence d’un Dieu chrétien ! À voir donc…
Une deuxième critique beaucoup plus forte c’est avec Kant. Le raisonnement de l’auteur quel qu’il soit, prend en compte des objets métaphysiques. Mais autour de ces objets métaphysiques on peut rien bâtir de sérieux… Je ne suis pas d’accord avec toi, il y a des choses qui dépassent notre entendement et auxquelles nous ne pourrons jamais répondre.
Imaginons une licorne rose (ou n’importe quel objet) indétectable par essence par l’homme (quel que soient les techniques employées présentes ou futures ou hypothétiques), c’est pas inconcevable. Alors si c’est complètement indétectable, comment je fais pour prouver son existence ou sa non-existence ? Je ne peux pas, car par essence on ne peut rien savoir de cet objet. À partir de là, je vois pas même pas comment on pourrait faire des probabilités. Si on avait certaines connaissances sur la possibilité des objets indétectables par l’homme, on pourrait peut-être déduire que ce type de licorne est très probable.
Pour en revenir à la question de Dieu, je pense que tu fais fausse route sur deux points au sujet de l’agnosticisme. À propos de l’indécision, personnellement je me considère pas comme indécis, je pense tout simplement que comme du point de vue humain il n’y a pas de solutions à ce problème, alors du point de vue humain il n’y a pas de problème.
À propos de «on ne peut pas savoir, donc probablement 50% jusqu’à ce qu’on ait une preuve», je suis pas du tout d’accord. Le “on ne peut pas savoir” implique quelque de beaucoup plus fort qui est que si on ne peut pas savoir, on ne peut pas faire de probabilités et on ne peut/pourra pas apporter de preuves.
La clé de ce petit débat, c’est La critique de la raison pure avec la possibilité de la métaphysique comme science ou non. Tant que je crois que la métaphysique ne peut être une L’agnosticismescience, il serait stupide de ma part de dire que c’est du 50/50 pour ce qui concerne l’existence de Dieu. Par contre il serait sensé de dire que la question de l’existence de Dieu est stupide…
P.S. L’exemple de Comte est pas très convaincant puisque ça concerne des objets physiques. Si j’avais été à son époque et que j’avais suivi la démarche de Kant, je me serais interrogé sur la possibilité de la physique comme science et si j’en avais conclu que la physique comme science était possible, alors j’en aurais déduis qu’il aurait été possible d’étudier les étoiles.
P.P.S. J’ai dit “au-dessus” parce que l’agnostique étudie la question plus en amont, il étudie les conditions de possibilité de répondre à cette question.
Si ce que tu dis est vrai, alors la théorie de la relativité générale, la mécanique quantique (ou même les mathématiques poussées), n’ont rien de sérieux.
Aah, tu as bien fait d’ajouter indétectable «par tout moyen futur ou hypothétique», ça rend l’argument plus vicieux, mais ça revient au même. Un moyen hypothétique futur n’est pas prévisible, il est impossible de dire que ça restera à jamais impossible. Qui aurait pu prédire, au 19e siècle, les possibilités offertes par les communications sans fil? Nous est-il permis d’affirmer aujourd’hui que la téléportation instantanée ne sera jamais mise au point, ou que nous ne vivrons jamais sur une autre planète?
La durée requise pour acquérir la solution pourrait tendre vers l’infini, la race humaine pourrait être éteinte, etc. Cependant, il ne nous est pas permis d’assumer que ça ne sera jamais découvert, soit par nous ou par une autre espèce, et il ne nous est certainement pas permis de nous mettre volontairement un bandeau sur les yeux et des bouchons dans les oreilles en classant cette connaissance comme «éternellement inatteignable». C’est ce que les théistes nous disent depuis des millénaires, et ils se voient obligés de reculer constamment devant les explications—plus parcimonieuses et efficaces—que la logique et la science apportent.
Ceci devient une question de moyens, pas une question de possibilité.
Si la chose existe, alors elle est détectable. Si elle existe et qu’on ne la détecte pas, c’est que nos moyens de détection ne sont pas assez perfectionnés. Si la chose est indétectable jusqu’à la fin de l’univers (selon ton argument ci-haut), alors… selon nos définitions de l’existence, elle n’existe tout simplement pas.
Pour ce qui est d’exister sans être détecté: ce n’est pas parce que l’humain ne peut pas voir les infrarouges ou entendre les ultrasons qu’ils n’existent pas; or, il y a quelques années, ce genre de perception élargie n’aurait pas été possible sans amélioration de nos outils et aurait semblé faire partie du métaphysique. Comme on dit souvent, toute technologie suffisamment avancée est indistincte de la magie…
Qu’en est-il de la pensée? La pensée n’est pas qu’un phénomène neuronal, elle est une propriété émergente qui dépasse la somme de ses parties. Où la situe-t-on? Dans le semi-métaphysique? Est-ce que la psychologie est une impossibilité parce qu’il serait inconcevable de comprendre l’intangible?
S’il n’y avait pas de croyants, il n’y aurait pas de raison d’être à ce débat. Or, c’est justement le gaspillage monumental de ressources sociétales et les injustices créées par la croyance en un dieu personnel qui amène la nécessité de se dresser contre cette aberration. Je préfèrerais bien que ce débat n’aie même pas besoin d’exister. Éviter cette question, c’est fermer les yeux devant l’irrationnalité caractérisant le culte religieux.
” Éviter cette question, c’est fermer les yeux devant l’irrationnalité caractérisant le culte religieux.”
Justement en tant qu’agnostique je dis que SI Kant a raison alors il ne peut y avoir de discours rationnel et qu’à un moment on va tomber dans la foi. Kant qui croit en Dieu le reconnait lui-même. Si tu veux, ça éradique le problème à la source, tandis que toi en tant qu’athéiste tu éradiques le problème en répondant à la question. Encore une fois si Kant a raison, la position agnostique est beaucoup plus forte, puisqu’on supprime le problème sans même rentrer dans le débat.
Pour essayer de résumer:
– ma position = Il serait irrationnel de vouloir répondre à cette question
– la tienne je suppose = Il est irrationnel de croire en Dieu
” Un moyen hypothétique futur n’est pas prévisible, il est impossible de dire que ça restera à jamais impossible.”
Là tu déformes mon argument, puisque j’avais spécifié que c’était l’essence même de l’objet. Cette essence est indépendante de ce que l’homme à un moment t peut imaginer.
Dans la suite de ton contre-argument, tu me dis que si l’objet existe alors il est détectable. Cela est vrai seulement si on est matérialiste. Mais tu précises que tu entends une définition particulière de l’existence qui si par nature on ne pourra jamais détecter la chose, alors ça n’existe pas. Je suis pas du tout d’accord avec cette définition, exister c’est être et c’est complètement indépendant du fait qu’il y ait des hommes sur Terre qui peuvent y penser ou non… À la question de l’existence de la licorne indétectable, il y a une réponse en soi comme pour la question de l’existence de Dieu.
Là où tu fais fausse route, c’est que les objets métaphysiques, ne sont pas matériels, mais en plus ils sont par essence inaccessibles à l’homme… Nous on a accès aux phénomènes, mais pas aux choses en soi (noumènes). J’ai l’impression que t’as du mal à distinguer la nature de ces deux types (physique et métaphysique) d’objets (le cas des mathématiques est un peu particulier, je pense pas que ce soit une science donc ça rentre pas ici dans le débat). Y a pas vraiment de piège, les objets qui par leur définition qu’on leur donne, rentrent dans la catégorie des objets métaphysiques, impliquent qu’ils nous sont inaccessibles (exemple de la licorne). On pourrait dire que quand on créé un objet métaphysique, on créé quelque chose auquel on aura jamais accès. Ce qui nous empêche de prouver son existence ou sa non-existence.
À partir de là, ça sert plus à rien de chercher une quelconque vérité autour des objets métaphysiques et finalement la réponse à la question devient sans importance.
P.S : Pour le cas des infrarouges, même remarque que pour Comte.
P.P.S : J’ai pas trop envie de rentrer dans un débat sur la pensée, je suis personnellement matérialiste, donc j’ai pas trop de soucis à ce niveau là 😉
Je viens d’acheter le bouquin, ça m’a l’air intéressant ! J’ai survolé le chapitre sur l’agnosticisme. Ça m’a amusé et surpris de voir à quel point je me retrouvais dans la position ADP. Après ce survol, j’aurais tendance à maintenir ma position comme quoi la question “Est-ce que Dieu existe”, n’est pas une question scientifique, ça reste une question métaphysique.
En tout cas je vais approfondir ça et je vais amener le bouquin en vacances. Même si je suis agnostique, j’ai beaucoup de sympathie pour les athéistes 😉
Update :
En fait j’adhère complètement aux propos de l’auteur, je suis athée en ce qui concerne un quelconque Dieu personnel (exemple : Dieu chrétien). Par contre je suis agnostique en ce qui concerne un Dieu purement métaphysique pour les raisons évoquées avant. Y a eu un petit malentendu, vu qu’on a pas défini ce qu’on entendait chacun par “Dieu”.
On peut se demander ce que serait un Dieu purement métaphysique. Pour moi c’est un peu le Dieu des philosophes. Dawkins s’en rapproche un peu lorsqu’il parle à un moment d’un Dieu minimal, très passif. Dans tous les cas, c’est pas ce Dieu que l’auteur a dans son viseur, il le dit clairement au début.
J’ai pas encore fini le bouquin, mais je recommande vivement de le lire !
Aah, content de voir qu’on s’entend tout de même 🙂 le débat métaphysique reste intéressant, mais une question philosophique sans fin (du moins à en croire nos commentaires). Des heures de plaisir.